Comme certains d'entre vous -- notamment les lecteurs du
blogue de Christopher Moore -- l'auront déjà constaté, l'édition numérique du
Dictionnaire biographique du Canada vient de faire
peau neuve. La conception graphique a été modernisée. Le moteur de recherché a été peaufiné. On annonce aussi un mode d'opération désormais dynamique : de nouvelles biographies seront mises en ligne à chaque semaine et les anciennes seront de temps en temps corrigées.
Au nombre des biographies auxquelles on a apporté des corrections, celles de Paul de Chomedey de Maisonneuve, Philippe de Rigaud de Vaudreuil et Michel Sarrazin. Je n'ai pas repéré, au premier coup d'oeil, le neuf dans la biographie de Maisonneuve. Dans celles de Vaudreuil et de Sarrazin, une "bibliographie de la version revisée" ne révèle que des modifications mineures, qui s'en tiennent aux dates et lieux de baptême, marriage et décès.
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Dépeindre ou ne pas dépeindre, voilà la question! |
Ce nouveau
DBC incorpore par ailleurs une foule de portraits. L'idée d'ajouter du visuel à l'écrit me semble excellente, mais elle est ici mal éxécutée. Les représentations d'époque se mèlent effectivement aux oeuvres ultérieures, fruits de la liberté artistique, de méprises et de malversations. Afin de donner un visage aux figures marquantes de l'histoire de la Nouvelle-France, les éditeurs ont recours à des tableaux des XVIe-XVIIIe siècles, mais aussi à des lithographies, des huiles et des statues du XIXe siècle et du début du XXe. La notice de Samuel de Champlain, par exemple, est accompagnée du
célèbre portrait de l'explorateur... portrait qui n'a rien à voir avec l'homme, dans la mesure où l'on sait qu'il est basé sur celui d'un intentendant des finances de Louis XIII, Michel Paricelli d'Emery. Au pied de cette notice on trouve une douzaine d'autres représentations, les unes aussi peu fondées et anachroniques que les autres.
Deux poids, deux mesures? La rigueur des
textes du
DBC est sans pareil. Ais-je tort de vouloir que ses éditeurs fassent preuve d'autant de rigueur en matière d'
image? Dans les cas où l'on ne connaitrait aucun portrait fiable d'un personnage donné, la demarche historienne ne dicte-t-elle pas qu'on se contente du mystère? L'histoire a-t-elle à ce point horreur du vide visuel qu'elle doive à tout prix le combler? À vrai dire, nous avons ici affaire à une faiblesse généralisée chez les historiens professionnels et le public averti. Alors qu'on s'évertue à établir, respecter et faire respecter les faits qui s'expriment à l'écrit, on se soucie assez peu de ceux qui s'expriment visuellement. Le
DBC, il me semble, pourrait jouer un rôle important en s'imposant comme outil de référence definitif du portrait canadien
authentique.
P.-F.-X.